Agnès Doneau est née en 1967 à Angers, dès son enfance des signes précurseurs se manifestent et annoncent un parcours artistique exceptionnel, ils jalonneront sa vie et lui ouvriront des horizons chargés d’un passé à réécrire. L’artiste a partagé avec nous le tout premier « signe » « Ce jour-là le temps était resplendissant en ce début du mois de novembre, je folâtrais sur le perron quand soudain j'ai entendu l'annonce de l'assassinat de Pasolini à la radio, la voix du journaliste est encore très nette dans mon souvenir, j'avais huit ans, je me suis arrêtée quelques secondes et j’ai ressenti le poids des générations, un sentiment de mort difficile à expliquer..."un peu de temps à l'état pur ».
Enfant Agnès Doneau passait son temps à scruter les visages de son entourage à la recherche de ce qu’elle appelle « un petit moment de vérité ». Initiée par sa mère au dessin, aux couleurs et à la beauté des choses, elle a aussi reçu un héritage précieux de ses deux grands-pères, l’image cinématographique. La découverte de l'œuvre de Pasolini à 15 ans a été un véritable choc et aura un impact considérable dans sa vie et dans son travail graphique
C'est dans ce contexte qu'Agnès Doneau entreprend des études aux beaux-arts pour parfaire la technique puis poursuit en histoire de l’art dans le cadre d’un projet ERASMUS qui lui permettra de découvrir le chantier de restauration Del Duomo di Firenze qui fut pour elle « la révélation ». Elle entreprend donc une spécialisation de restauration de tableaux à l'Université internationale de Restauration à Florence et quelques années plus tard passe l’agrégation.
Son métier de restauratrice d’œuvres d’art lui a permis de voyager non seulement dans des pays somptueux comme l'Italie et le Moyen Orient, mais aussi durant une vingtaine d'années à l'intérieur d'un tableau, d'une fresque pour y découvrir une histoire, les traces d'une pensée en actes et ainsi poursuivre une conversation cousue de siècle en siècle.
Le pinceau ultra fin n 1 de Restaurateur a laissé place à un spalter qui lui a permis de se jeter corps et âmes sur d’immenses toiles ...et de se consacrer davantage à la peinture.
Sensible à la notion de " répétition " de Kierkegaard, ses peintures dans sa première série des corps s'emparent des dessins de la Renaissance, du Maniérisme pour leur insuffler une autre vie dans un espace intemporel. Ce n'est plus le dessin qui prend le dessus mais bien la peinture, la gestuelle...Cette notion de répétition est très belle car elle est l'affirmation que l'expérience passée est toujours un possible. Il y a reprise, le présent ressaisit le passé et l'avenir ...cette intemporalité ne s'atteint pas par un retour nostalgique vers un passé révolu mais par un mouvement vers l'avenir une projection vers l'avant, un "ressouvenir en avant".
Le choix de ses sujets provient en général d'un choc émotionnel, cinématographique, musical, littéraire comme Eldorado de Gaudé qui fut l’élément déclencheur - un véritable dessillement sur le monde - de sa série sur les « Exilés ». La littérature a anticipé ce qu'Agnès Doneau allait découvrir avec effroi en Sicile lors d'une intervention sur un chantier. Cette vision d'hommes perdus, hébétés n'a cessé de la hanter et lui a fait comprendre que l'art en général ne peut s'abstraire des tremblements du monde ...
« J'envisage la littérature et la restauration comme un immense palimpseste, la mémoire du monde, une suite infinie et vertigineuse de citations, de permutations, de recréations, de réinterprétations, d’interventions successives à travers le temps ».
D’autres sources d’inspiration comme le générique de "L’enfance d'Ivan" d'Andrei Tarkovski, les œuvres de Kafka ; le cinéma de Kurosawa, Dreyer, Erice, Kiarostami, Welles, Sokourov, Fellini, .P.Pasolini, i fratelli Taviani ou le film saisissant de Nemec " les Noces de diamants " furent à l'origine d' une série sur « le mouvement » la fuite qui avait un rapport avec les migrants...qui ont tous en commun une puissance poétique et spirituelle, ou la chorégraphie, le rituel et le cérémonial sont omniprésents.
Pour Agnès Doneau l’expressivité ne passe pas uniquement par la représentation mais par la plasticité, la gestualité. Le geste se laisse voir, donne une dimension, un sens supplémentaire au tableau. Le geste rapide, nerveux met en avant le mouvement, l’action directe sur la toile sans esquisse et lui permet d’aller à l’essentiel. « Ce qui me passionne c'est la mise en scène comment les toiles se répondent se font écho. Les images sont montées comme des séquences, des plans pour recréer un ensemble dynamique une sorte de ballet intemporel retranscris dans le champ pictural »
Les signes « Pour vous dire que ma vie a été parsemée de petits signes que j'ai su plus ou moins capter. A Venise en 1990 je ressens ce moment d'éternité face au Musée Correr, six années plus tard je restaure les fresques les trompe l'œil du Musée ..Au lendemain de l'incendie de la Fenice en1996 je ressens encore ce temps me peser en regardant la fenêtre qui s'ouvrait sur le vide, en 2002 je restaurais l'apparat décoratif du Théâtre ....je pourrais multiplier les exemples ».
Quelques restaurations :Sainte Sophie – Istanbul – -Turquie (Mosaïques)
La grande mosquée des Omeyyades – Syrie (Mosaïques)
La villa des mystères – Pompéi (Fresques)
Museo S.Marco – Florence
Palazzo Medici-Riccardi – Firenze
Museo Correr- Venezia
Teatro della Fenice – Venezia
Expositions :Galerie 360 Florence « littérature et cinéma » - Florence
Temple du goût « Les exilés » Nantes
Centre d’art contemporain ‘Aller simple » Angers
Musée des beaux-arts/Palais de l’Europe « L’esthétique du corps » - Menton
Galerie Depardieu « Urban solitude » - Nice
Centre d’art contemporain « Conversation sur Homère » Angers
Découvrez l'exposition 2024 à la galerie Bouillon d'art à Bordeaux
Les mots de la galerie sur Agnès DONEAU
En septembre 2023 Agnès Doneau m’adresse un email pour me faire découvrir son travail. Dès le premier regard posé sur son catalogue, je retiens mon souffle me demandant ce que pouvait encore me dévoiler la page suivante. Dynamisme, musique, partition, littérature son travail plastique a une grande musicalité, des messages forts qui m’emportent au grès des œuvres. Je la contacte par téléphone emballée par l’idée de la représenter. Tout est simple, artiste humaniste elle est en parfaite harmonie avec son travail et une réelle envie de collaboration s’exprime des deux côtés et je lui propose une exposition avec la sculptrice Val Carr-Ortolan en janvier 2024. Les deux artistes s’émerveillent des œuvres de l’autre et se réjouissent d’exposer en duo, l’harmonie est parfaite, Agnès entre en galerie pour notre plus grand plaisir.